Ambrosia...
Ambro était sur un quai, vide de monde, obscur en cette nuit d’été qui avait laissé fuir le soleil depuis…Combien déjà ? Elle ne s’en souvenait pas, elle ne le savait tout simplement pas, tout comme le reste. Cette gare : « Brokensoul », drôle de nom, inconnu, illusoire…un rêve peut-être. Elle en doutait.
Elle se leva
du banc d’où tous ses souvenirs remontaient. Elle regarda alors face à elle,
rien en vue, pas même une lumière lui prouvant qu’il y avait de la vie quelque
part. Elle fit quelques pas jusque la porte délabrée d’un rouge suspect menant
à l’intérieur de la gare. Elle tenta de l’ouvrir, poussant de son épaule le
bois encore dur mais qui voyait sa peinture le fuir, sans succès.
Elle passa
une main en signe d’angoisse dans ses cheveux bruns, lâchés, sauvages, en
désordre. Ses yeux sombre scrutèrent encore une fois la nuit mais rien ne vint
perturber son silence. Le quai n’était que faiblement éclairé par une ampoule
incertaine qui manquait de s’éteindre à chacun de ses souffles.
Ambro
s’approcha des rails, tendant l’oreille au cas où elle ne percevrait pas le
grondement d’un train…Mais non rien.
Et là, une
sonnerie qui la fit sursauter, juste un bip bip bip en continue accompagné d’un
vrombissement qui provenait d’une des poches de son jean. Par réflexe, sa main
se posa sur l’endroit approprié et elle en sortit un portable tout neuf qu’elle
n’avait jamais vu auparavant. Sur l’écran couleur du téléphone était
inscrit : « Browser ».
Par dépit,
ou encore par curiosité elle décrocha. Aucun son ne sortit de sa gorge mais à
l’autre bout du fil, une voix rauque lui dit :
« Ferme
les yeux et vient à moi, tu peux le faire. »
Tuutuutuut…L’inconnu
avait raccroché sans attendre de réponse. Ambro surprise, un peu plus
angoissée, remis l’appareil dans la poche où elle l’avait trouvé. Elle ne
savait pas trop comment réagir, l’endroit lui fichait la trouille et cette
voix…Elle ferma un instant les yeux, mais rapidement, juste pour calmer son
stress…Puis son regard se posa sur le banc où elle s’était trouvé, et ses pas
la mena jusqu’à lui. Elle s’assit et ferma les yeux…
Vous avez
déjà eu un vertige ? Vous savez, un de ceux que l’on a lorsque l’on est
enfant et qu’on s’arrête après avoir tourné sur soi même des boucles et des
boucles . Et bien c’est exactement ce qu’à ressenti Ambro en fermant les
yeux et en se concentrant simplement sur cette voix inconnue qu’elle a entendu.
Pour échapper à ce vertige qui lui semblait durer une éternité elle ouvrit
soudainement les yeux.
Ce qu’elle
vit lui parut pratiquement désastreux. Le quai abandonné avait laissé place à
un immense désert où très vite elle se mit à grelotter en raison du froid. Elle
était assise à même le sol, ses doigts pouvaient s’enfoncer dans le sable et le
laisser glisser silencieusement. Toujours ce néant de plomb, aucun son, aucune
trace de vie. Elle se leva précipitamment, se croyant de plus en plus
prisonnière d’un jeu virtuel dont elle n’avait jamais entendu parler. Ses mains
sur ses bras dans une étreinte personnelle, elle se mit à avancer au sein du
désert, ses pas se faisant lourd en raison du sable…Elle ne voulait pas crier,
non, elle ne voulait pas laisser place à l’angoisse, à la folie, elle devait se
rassurer et la seule méthode qu’elle connaissait depuis son réveil sur le quai
c’était de fermer les yeux…Vous savez, à l’inverse d’un cauchemar où on tente
d’ouvrir les yeux, là il faut les fermer…Ce qu’elle fit.